Malgré la chaleur à Gaza, des milliers de Palestiniens se sont précipités lundi 12 septembre dans les colonies évacuées à l’extrémité nord de la bande de Gaza.
Vieux, jeunes, gamins, pêcheurs, fermiers, des familles entières voulaient jeter un regard historique sur les trois colonies de Doughit, Eli Sinai et Nissanit.
Des pêcheurs ont poussé leurs bateaux à la mer tandis que des hommes installaient leurs cannes à pêche sur le rivage. Des adultes se promenaient parmi les débris de Doughit pendant que les adolescents plantaient des drapeaux palestiniens et autres bannières sur les poteaux électriques du réseau détruit..
On pouvait voir des véhicules, modernes et anciens, des vélos, des charrettes, des motos, et d’autres moyens de transport bouger dans les tas de débris et les arbres déracinés dans les colonies dévastées. [1].
Au sud de Doughit, Karam Al-How, 15 ans, joue avec les restes d’une voiture démolie, abandonnée par les occupants. Il semble si content de « conduire » la voiture. Karam dit qu’il est heureux de l’évacuation. “Je suis content parce que la prison qu’est Gaza s’est agrandie” dit-il.
Quand on lui demande pourquoi il pense que Gaza est une « plus grande prison », Karam dit : “Gaza était une petite prison et elle est plus grande maintenant » Il ajoute : « c’est toujours une prison parce que les Israéliens contrôlent les frontières et la mer et que nous ne pouvons pas aller à l’étranger ».
Karam dit qu’il est venu à Doughit pour voir la terre de son père. Montrant un endroit couvert d’herbe sèche et brûlée, il dit : « Tu vois, c’est notre terre, il y avait plein d’arbres couverts de fruits. Il y avait un puits et une maison. Maintenant il n’y a rien, ils ont tout détruit. » Karam se rappelle qu’il jouait sur ce terrain avec ses frères et soeurs, mais ces cinq dernières années, ils n’ont pas pu le faire après que les Israéliens l’avaient détruite et annexée à la colonie.
Le garçon dit que son père, ses frères et lui la « feront reverdir », ajoutant, pour plaisanter, qu’il est triste que les Israéliens aient détruit la voiture avant de partir. « Mon père aurait pu l’utiliser pour compenser le vol de nos terres » dit-il.
Près de là, barbe blanche et turban, Said Al-Okka, 77 ans, est assis sur un monticule. Depuis les petites heures il se sert du café arabe d’un pot blanc, les yeux fixés sur un lopin de terre, couvert d’herbe sèche. « C’est ma terre » dit-il. « Elle était aux mains des Israéliens et je vais la récupérer au bout de 6 ans de confiscation. Au minimum mille oliviers et figuiers et un puits et la maison ont été rasés par les bulldozers israéliens il y a 6 ans. Maintenant vous voyez, je n’ai qu’une terre dévastée », dit-il. Said Al-Okka a aussi indiqué que les Israéliens avaient volé de gros tas de sable blanc et fin sur sa terre.
Des parents se promènent avec leurs deux enfants. Hazem Hawila, 42 ans, dit que ses enfants lui ont demandé de leur montrer les colonies. "Ils sont tellement contents de voir les colonies,”dit-il, “ils ne faisaient qu’en entendre parler aux informations. Ma femme et moi avons aussi très envie de les voir ». Hawila se demande pourquoi les Israéliens ont arraché les arbres avant de partir.
Un pêcheur, Ayman Al-Hissi, 53 ans, dit qu’il est venu faire son métier dans un endroit auquel il n’avait pas accès avant. "Autrefois, quand j’étais jeune, je pêchais dans cette zone mais depuis que les Israéliens ont occupé Gaza en 1967, je n’ai jamais pu le faire » dit Al-Hissi. Maintenant, même si je ne pêche rien, je pourrai savourer cette nostalgie."
Hawila ajoute qu’il est soulagé de ne pas entendre l’habituelle litanie des rapports sur les Palestiniens tués par les troupes israéliennes postées dans les tours de guet de la colonie.
Sur la route de Doughit à Nissanit , deux enfants, Mohammed Hmaid, 8 ans, et son cousin Abdullah, 7 ans, font du vélo et portent un drapeau palestinien. Mohammed dit qu’il est heureux du retrait car on n’entendra plus de tirs. Les deux enfants de Beit Lahia sont d’accord, ce qu’ils voulaient c’est l’absence de tirs au milieu de la nuit et pouvoir sortir de chez eux la nuit.